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Workshop de création radiophonique

During the weeks at the beginning of the second semester at the HEAD – traditionally dedicated to transversal workshops – the artist Vidya Gastaldon invited the sound artist Jonathan Frigeri to design a radio workshop with around twenty registered students. Two podcasts which stemmed from this week of workshops are published here.

Since being invented at the beginning of the 20th century, the radio mass-medium has been re-purposed by artists who have made it their own. Their personal, often critical, use of radio goes against the mercantile, controlling and conformist tendencies of mainstream radio and explores the poetic potential of experimenting remotely. In his introduction, Jonathan Frigeri lays the foundations of a radio-art which goes beyond simply mixing sounds, music and speech, taking into consideration the listening mode and the phantasmagoria produced by the faceless voices carried by radio waves and optical fibres.

Alternating silence, relaxation, noise and chaos, poems, readings, parodies and music, the students’ creations bear witness to the manifold expressiveness of radio, a medium which the Internet has made widely accessible in recent years.

 

 

L’art radiophonique n’est pas simplement de l’art sonore transmis à la radio. C’est davantage une histoire de connexion que de son, même si cette connexion passe par le son. Si l’on veut utiliser la radio comme un vrai outil de création, il faut prendre en considération ses différents paradigmes techniques, sociaux, philosophiques et symboliques. Et commencer par rappeler que la radio s’introduit dans notre espace intime. Les auditeurs ne se rendent pas à un spectacle, mais c’est ce spectacle radiophonique qui pénètre chez eux.

 

“Si au théâtre, nous écoutions l’opéra comme nous l’écoutons chez nous à la radio”. Illustration tirée du livre: La musica alla radio 1924-1954. Storia, effetti, contesti in prospettiva europea, sous la dir. de A. De Benedictis et F. Monteleone

 

L’écoute radiophonique est une écoute à dominante passive et distraite, à l’intérieur de l’espace domestique, où la prédisposition à l’écoute est moins prononcée que dans une salle d’opéra. Cette caractéristique n’empêche pas au spectacle de la radio de s’introduire en profondeur dans les oreilles et de pénétrer, avec séduction, dans son orifice. La radio a le pouvoir de se connecter au système nerveux central mieux que tout autre média. Son pouvoir d’influence, de fascination et de manipulation est comparable à celui d’un tambour tribal qui résonne dans les consciences de masses entières. On parle ici de masses de personnes isolées. L’espace d’écoute radiophonique est une architecture fluctuante et instable produite par l’imagination de l’auditeur, ou mieux par l’imagination collective de tous les auditeurs. Cette structure spatiale ne coïncide pas forcément avec une situation topographique ou architecturale existante, c’est un espace semblable à la mémoire ou aux rêves capable de créer sa propre temporalité. La radio est en même temps un lieu et un non-lieu.

Le bruit des activités quotidiennes se mélange avec les propositions sonores de la radio. La vie et les bruits du quotidien s’amalgament à la musique et aux voix que la radio envoie dans l’éther. Ces voix sans corps qui nous parlent, qui sont partout et en même temps nulle part, créent une intimité sans visage, cette même intimité qu’on pourrait partager avec notre voix intérieure, la voix de notre conscience.

Qu’est-ce donc qu’une voix radiophonique, une voix sans corps, une voix désincarnée, une voix « phantasmique » ? Sachant que la voix vient du souffle pulmonaire, passe par le larynx, ensuite résonne dans la chambre d’écho composée par la gorge et le nez et fini par être modelée par la langue et les lèvres. Comment l’idée d’une voix sans corps peut-elle exister ?

La radio est donc un son (ou une voix) derrière nous, qui parfois nous interroge et parfois nous échappe. Une sorte de fond sonore plutôt qu’une écoute frontale. Souvent c’est même la bande sonore de notre journée, une bande son indépendante de notre volonté : nous n’avons le choix que d’écouter ou de ne pas écouter, c’est un événement dont la programmation est entièrement soustraite à notre volonté. Cette volonté de contrôle fait aussi défaut à la personne qui transmet la radio, laquelle ne peux maîtriser ni connaître le produit sonore final. Sa qualité de réception, son intelligibilité, son contexte d’écoute, n’est connue que par chaque auditeur individuel et de manière à chaque fois différente. Il s’agit donc d’une œuvre qui reste ouverte et ce sera à chaque auditeur de la compléter, en choisissant le dispositif d’écoute, le lieu, l’environnement, jusqu’à pouvoir maîtriser son volume sonore. Cet organisme implique donc une complicité, une liaison, une relation, une connexion.

Jonathan Frigeri

 

Conçu spécifiquement pour ISSUE, cet edit rassemble le best-of des contenus créés par les étudiant·e·s durant la semaine du workshop.

 

Cette émission conçue par les étudiant·e·s a été diffusée en direct sur la radio berlinoise fr-bb le lundi 17 février 2020.

 

Le studio de Radiohead au 4e étage du Boulevard Helvétique

 

Chambre d’échos

La radio pour nous transporter, la radio pour nous évader, la radio pour nous cultiver, la radio pour nous fédérer, la radio pour nous informer… Des ondes pour rêver, rêver pour mieux se connaître et se comprendre, mieux se comprendre pour mieux comprendre le monde, mieux comprendre le monde pour ne pas le subir et mieux résister. Mieux résister pour ne pas désespérer. La poésie pour ne pas désespérer, la poésie pour résister. La radio parce qu’elle est sans parasites sensoriels, la radio parce qu’elle ne stimule que l’imagination. La radio parce qu’elle est un médium dans lequel nous sommes égaux. Des ondes invisibles car la poésie n’est pas matière tangible. La radio, parce que les fruits sont à tous et que la terre n’est à personne. La radio pour nous révolter.

Jonas Tirabosco

 

Ah la radio cette douce et farouche passerelle de l’inconscient vers le subconscient, un noyau qui émet fantastiquement les frivolités et envolées créatives de nos fréquences respectives. Nos sessions de diffusion furent comme un joyeux concerto ou une pièce de théâtre avec des personnages désarticulés mais irrévocablement unis pour délivrer un ruisseau fluide de communions sensorielles.

Ophélie Couelle

 

À toi ST15B, merci.

Ambiance feutrée.
Canon de voix sur texte de Perec.
Improvisation théâtrale magistrale.
Tout augmente, tout. Tout baisse, tout.
Des feux de cheminée sur trois écrans Mac.
Lecture de Libertinus, « parce que le libertinage, c’est cool ».
Lecture de Maupassant, « parce que c’est bientôt l’heure du repas ».
Interview d’artiste inspirée par l’horizon en trois tiers, suivie d’une grande chanson.
Appel téléphonique entre école d’art et bar à chicha, quelque part au japon, selon papa.
Recette de Glitter-Gloubiboulga en mode poubelle magique, à base de rififi, de paillettes de chocolat et de gingembre.
Extrême drama sur fond de Schubert, explorant la douleur d’une lèvre fendue par un papier.
L’auteur slovaque d’une reprise de Joe Dassin en monologue glitché diffusé à Berlin.
Écoute matinale d’un oiseau imitateur de tronçonneuse.
Interprétation de Proust façon chants grégoriens.
Créations sonores multiples et variées.
Relaxation intime avec un dauphin.
Description érotique de peinture.
Mixage de bonne énergie.
Piratage d’énergie.
Cristallisation
Émulation
Passion
Son

Et les ondes pour les plantes, alors?

Anaïs Balmon et Jessiva Völke

 

Avec des contributions de:

Melina Oria Alhadeff, Anaïs Balmon, Timothée Bédat, Tiki Borin, Thomas Cerrato, Ophélie Couelle, Toscane Donzé, Marie Dupraz, Simon Frommel, Vidya Gastaldon, Julien Horni, Mikaël Lewertoff, Tamara Liardet, Séréna Marcelline, Tanguy Melinand, Julia Pellichet, Caroline Savary, Jonas Tirabosco, Jessica Völke, Louise Wang, Tom Wenger

Special guest: Claude-Hubert Tatot