Korakrit Arunanondchai

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« Trouverez-vous la beauté dans cet océan de données? », demande Arunanondchai en thaï dans la vidéo, « nous l’avons retenue juste pour vous. » Prolongeant son travail commencé avec les trois précédentes vidéos de sa série Painting with history in a room filled with people with funny names, l’artiste engage un échange épistolaire et hypnotique avec Chantri, le drone esprit, il s’agit de la voix de sa mère, professeure de langue, qui parle en français. Ces phrases rendent hommage à l’essai de Chris Marker Sans Soleil (1983), mais également au film-hommage de Marker Alfred Hitchcock’s Vertigo (1958), tous deux parlant de l’envie de recréer, de revivre, de revisiter, de trouver l’intimité avec ce qui échappe et, ce faisant, nous domine. Ces mêmes préoccupations sont au centre des œuvres précédentes d’Arunanondchai : son corps, ou celui de son jumeau, est pressé contre les images pour tenter de les marquer ou de les affecter de la manière dont elles marquent ou affectent le corps. Il tente de forger un engagement non unidirectionnel avec le spectacle. Mais ici, dans un espace cinématographique marqué de spéculation et de documentaire, l’artiste affronte la force mercurielle de la mémoire. Plus précisément, il aborde la contradiction apparente entre la subjectivité fluide requise pour contextualiser les images qui composent la mémoire, et la technologie que nous avons conçue pour en prendre soin. « Qu’advient-il des souvenirs quand ils sont incrustés dans des machines ? Est-ce qu’ils pourraient se reconstituer pour former de nouveaux cadeaux paradigmatiques basés sur une version aliénée de notre passé ? Est-ce qu’ils nous oublieront, et peuvent-ils réellement nous survivre ? »

Annie Godfrey-Larmon