Abstract
During a research project, the stage director Isis Fahmy and designers Laura Couto Rosado and Benoît Renaudin joined forces to assess the concept of performative objects. This notion, which they invented, covers objects that set a story in motion but which are above all fictions in themselves, specifically imagined for on-set action and actively evolving in the same way as the actors during their performance. At the time of this research – a joint project by the HEAD–Genève (HES-SO) and the Manufacture in Lausanne – Couto Rosado, Fahmy and Renaudin invented three practical capsules to explore points of convergence between the design and theatre practices and to consider our relationship to the other, be it machine, material or a living being. Interviews were also conducted with the German designer Judith Seng, and with the French stage director Halory Goerger. This article summarises different moments in the research process by combining various formats, such as theoretical text, video footage, the design of performative objects, captioned photographs and interviews.
Text
Ce projet de recherche, qui s’est déroulé de juillet 2018 à octobre 2019 entre la Manufacture à Lausanne et la HEAD à Genève, a exploré un possible lien entre la pratique du théâtre et celle du design. L’objectif principal était de mêler les deux disciplines dans des processus de créations communs, collaboratifs, avec des praticien·ne·s venant de différents horizons.
Comment mettre en lumière de nouvelles pistes d’écritures théâtrales centrées sur des objets issus d’une réflexion en design ? Et inversement quelles pistes permettait d’inventer de nouveaux modes de conception d’objets centrés sur des processus théâtraux ?
Afin de circonscrire les champs du théâtre et du design qui relèvent de notre pratique, nous avons commencé par imaginer un concept : celui d’« objet performatif ». Cette notion évite de réduire l’objet à sa fonction de décor et le théâtre à la mise en scène d’une situation. Pour que théâtre et design coexistent et donnent naissance à un « objet performatif », il fallait que ce dernier réponde à une définition. Nous avons alors imaginé quatre axes : Théâtre, Design, Narration et Interaction. Ces potentialités, nous les avons tracées pour déterminer si nous étions face ou non à un objet performatif dans notre état de l’art.
Nous savions que pour commencer la recherche pratique, il fallait amorcer différentes approches. Nous avons imaginé trois capsules, comme trois temps de création d’un objet performatif.
I. Trois capsules de recherche
1. Quand le théâtre écrit du design fictionnel
Au début du XXème siècle, l’écrivain français Gaston de Pawlowski a démontré avec ses Inventions nouvelles et dernières nouveautés que les mots avaient cette capacité de faire naître des objets, certes spéculatifs, mais avec des fonctions bien concrètes et au fort potentiel narratif. Le mètre de poche ne mesurant que 10 centimètres de long est un exemple de ces objets immatériels et fortement persuasifs pour l’imaginaire. Cet objet décrit par Pawlowski, très pratique pour les architectes, permet en le déplaçant dix fois de suite sur une surface de mesurer un mètre. Outre l’humour qui se dégage des textes de l’écrivain, c’est cette capacité à designer des objets par le langage qui est à mettre en lumière. On retrouve également dans ces objets imaginaires un reflet des enjeux politiques, écologiques et sociétaux de la France des années 1920. Usant d’une même méthode, l’artiste visuel Jacques Carelman publie en 1969 son Catalogue d’objets introuvables, parodie des magazines de vente par correspondance de l’époque, symboles de la société de consommation des années 1950 et 1960. L’artiste marseillais y dessine de nombreux objets loufoques et souvent absurdes comme la Machine à mettre les points sur les i ou encore la machine à écrire pour égyptologue.
Le théâtre offre la capacité d’invoquer et imaginer de nouveaux objets, de nouvelles technologies et usages sociétaux sans l’obligation d’exister sur le plan matériel. Comment utiliser cette disposition du théâtre pour faire du design ? Quels protocoles peuvent être imaginés pour créer des objets performatifs ?
La question de la définition a été rapidement soulevée pendant cette session de recherche avec Piera Bellato (comédienne, diplômée de la Manufacture), Meriel Kenley (étudiante à l’ENS de Lyon), Isis Fahmy (metteure en scène et chercheuse) et Benoît Renaudin (designer et chercheur). « Mais finalement, qu’est-ce que le design ? »
Choisir le bon design
Comment décrire cette discipline aujourd’hui ? Elle n’est en effet plus celle que William Morris pratiquait en plein boom des Arts & Crafts et de l’ère industrielle. Difficile de soutenir que le design est toujours aujourd’hui un art décoratif ou appliqué où seuls la matière, les couleurs, la fabrication ou encore le choix de la forme définissent son processus de création. On ne parle plus seulement de design de produits, mais par exemple de design thinking, de transition design, de design serviciel ou encore de design d’interaction ou de design graphique. Le nombre de métiers relevant du design a explosé depuis vingt ans, notamment avec l’avènement des nouvelles technologies de l’information et de la communication.
Il existe une telle profusion de mouvements, d’adjectifs et de définitions (VIAL, 2015), que pointer ce qui est de la compétence du design s’avère difficile et réducteur sur le plan épistémologique. La nécessité de placer le design dans une perspective politique et critique, selon l’approche d’Alexandra Midal dans son Introduction à l’histoire d’une discipline par exemple, nous a dès lors semblée nécessaire. Il s’agissait ainsi de montrer que le design, dans cette recherche qui questionnait sa relation au théâtre, ne recouvrait pas l’ensemble de ses pratiques mais particulièrement celles qui se réclamaient de la fiction.
Depuis le début des années 2000, de nombreux designer·euse·s imaginent des objets fictifs afin d’explorer certaines tendances sociétales. Certain·e·s s’inscrivent dans une pratique nommée design critique et spéculatif, qui a notamment été théorisée dans des ouvrages d’Anthony Dunne et Fiona Raby, anciens responsables du département Interaction design du Royal College of Arts. D’autres se reconnaissent dans le Design Fiction ou encore le Transition Design. Parmi les exemples tirés de cette approche, on peut évoquer le travail d’Hiromi Osaki. En 2010, comme projet de diplôme, elle a imaginé la Menstruation Machine, une ceinture qui permettrait à n’importe qui de ressentir les douleurs menstruelles, peu importe son genre. Son objet est au centre d’un clip vidéo de pop japonaise, avec des actrices et des acteurs, montrant un usage quotidien de ce produit fictif.
Ce n’est donc pas le design dans son ensemble qui intéresse cette recherche, mais des pratiques qui comportent une part de fonctionnalisation et de narration dans leur processus de création et de monstration. Des manières de faire design permettant une rencontre possible avec le théâtre ou au moins une forme de théâtralité.
Repenser un téléphone
Afin de faire œuvre commune, nous avons imaginé un exercice de mise en lien en trois temps et avec les quatre participant·e·s. Le lieu dans lequel s’est déroulé l’exercice avait son importance car il a défini l’éventail d’objets exploitables. Nous nous contenterons de relater ici un seul cas pratique qui s’est déroulé dans la salle de répétitions de l’Institut de Recherche en Musique et Arts de la Scène, à la Manufacture de Lausanne.
Dans cet exercice, chacun·e des participant·e·s devait d’abord choisir un objet dans la salle et en faire une description objective en trois minutes. Il·elle devait prendre en compte la manière dont l’objet avait été fabriqué et sa fonction. C’est une pratique assez commune en théâtre lors d’une écriture de plateau ou par improvisations.
Notre exemple : Piera Bellato décide de présenter son téléphone et le décrit comme un objet en métal et en verre, avec des chanfreins. Il y a du carbone, de l’or et de l’argent dans la composition de sa coque. Usages : appeler ses parents pour leur dire qu’on est bien arrivé, se détendre dans le train, vérifier que sa commande est bien là, appeler son petit ami, etc. « Si quelqu’un ouvre cette boîte il saura tout de moi, et en même temps cela ne me fait pas peur. »
La deuxième partie de l’exercice consistait à troquer son objet contre un autre et à imaginer une nouvelle fonction pour celui que chaque personne recevait. Dans notre expérience, Benoît Renaudin a reçu le téléphone présenté par Piera Bellato et a proposé la création d’une application permettant de pouvoir interagir sur l’action d’une pièce de théâtre tout en interagissant avec les autres spectateurs.
Au cours de la troisième et dernière étape, chaque participant·e a échangé de nouveau son objet et a présenté un synopsis de création théâtrale. Isis Fahmy, qui n’était pas convaincue par la relation de jugement que l’application instaurait entre spectateurs et acteurs, a préféré mettre en avant la notion de collaboration entre les deux instances et a proposé d’imaginer un processus de création sur le long terme où les spectateur·trice·s font les choix d’écriture, de dramaturgie, de mise en scène et de direction d’act·rices·eurs
À chaque moment de cette expérience, le jeu des participant·e·s permettait de décrire l’objet imaginé qui, à son tour, écrivait un début de narration pour plateau de théâtre. Entre chacune des étapes de présentation, les participant·e·s prenaient part à une discussion commune, à la manière d’une écriture collective de théâtre ou de design.
Au gré de ces allers-retours, nous avons progressivement réuni des éléments narratifs, des protocoles de créations et des idées d’interactions avec les spectateurs. Cette matière nous a permis d’envisager la création d’une forme théâtrale inspirée de ces échauffements Théâtre & Design.
Assistant Média Intelligent
Ce début de dialogue entre praticien·ne·s issu·e·s du design et du théâtre sert d’amorce à une narration fictive : celle d’une zone d’habitation très particulière. L’objet performatif fonctionne comme le précurseur de l’écriture d’une forme théâtrale. Dans cette fiction, l’A.M.I. est un Assistant Média Intelligent, un engin en vol stationnaire permanent qui accompagne son utilisateur. Il répond à son utilisateur par les gestes que celui-ci produit. Chaque mouvement, personnalisable par chaque utilisateur, correspond à une action : envoyer un document, aller chercher du pain, me filmer, prendre des photos de moi, etc. L’introduction de ces nouveaux objets technologiques génère de nouveaux comportements dans la société. À Lausanne, un groupe d’habitants a réussi à faire ouvrir une Z.A.M.I., c’est-à-dire une zone où l’on peut vivre légalement avec son A.M.I. 24h/24h. Dans cette zone géographique, située dans le quartier de Prilly-Malley, ses membres organisent régulièrement des réunions d’information pour les nouveaux arrivants, qu’ils habitent ou non la zone.
Cette séance publique, qui s’est tenue le 5 février 2019 à la Manufacture, a demandé l’élaboration d’un certain nombre de documents : des panneaux de signalétique (qui ont été placés sur le parcours du spectateur), un formulaire d’intérêt, une charte éthique utilisateur remise aux spectateurs et des vidéos explicatives du fonctionnement des A.M.I. qui ont été projetées pendant la séance.
Ce qui est singulier dans cette expérience, outre le travail de mise en dialogue entre des praticiens du théâtre et du design, c’est que l’écriture de la forme théâtrale a été dictée par la création des documents constitutifs de la réunion d’information. Ces objets permettent à la fois de réaliser la description indirecte de l’artefact central, qui n’est jamais directement visible : l’A.M.I., mais surtout de faire avancer la fiction théâtrale.
L’A.M.I. est à la fois décrit, son utilisation est montrée en vidéo, ses utilisateurs en parlent mais à aucun moment il n’apparaît devant le spectateur.
Cet objet résonne fortement avec le concept de MacGuffin popularisé par Alfred Hitchcock. Dans son livre Le Cinéma selon Alfred Hitchcock (1967), François Truffaut décrit le MacGuffin par ce dialogue :
« Deux voyageurs se trouvent dans un train allant de Londres à Édimbourg. L’un dit à l’autre :
— Excusez-moi, monsieur, mais qu’est-ce que ce paquet à l’aspect bizarre que vous avez placé dans le filet au-dessus de votre tête ?
— Ah ça, c’est un MacGuffin.
— Qu’est-ce que c’est un MacGuffin ?
— Eh bien, c’est un appareil pour attraper les lions dans les montagnes d’Écosse
— Mais il n’y a pas de lions dans les montagnes d’Écosse.
— Dans ce cas, ce n’est pas un MacGuffin ».
L’important est ici de trouver, par l’intermédiaire d’un artefact, une narration, une situation. L’objet performatif a ceci de commun avec le MacGuffin qu’il permet l’élaboration d’une situation théâtrale et la création d’un objet de design questionnant notre société contemporaine et son rapport aux nouvelles technologies de l’information et de la communication.
2. Quand l’atelier de fabrication et de design devient espace théâtral
Dans cette deuxième capsule pratique de recherche, nous souhaitions tester une hypothèse qui partait d’un constat critique face au mode de fonctionnement de notre société. Constat selon lequel le concept, l’idée permet généralement de développer, de réaliser, de donner forme dans des temps raccourcis et donc d’augmenter l’efficacité et la productivité. Il ne s’agit pas ici de s’opposer frontalement à cet argument, malgré ses dérives libérales et capitalistes, car nous lui reconnaissons aisément aussi une part de vérité. Les chances de trouver quelque chose sont en effet plus élevées lorsque l’on pose des bases concrètes à une recherche. Mais, nous pensons aussi que l’idée, le concept, peuvent surgir de la matière et du faire. Il existe une sérendipité dans l’acte de création qui donne forme à l’idée, qui la modèle. L’ancrage de cette capsule était lié à l’espace : l’atelier bois de la HEAD et les compétences techniques d’Alexandre Simian. Il nous fallait par conséquent imaginer un cadre suffisamment circonscrit et en même temps permettant une grande liberté pour engager notre projet et notre collaboration sur la question de l’objet performatif. Ce cadre, pour nous, existe dans la narration, c’est-à-dire dans les mots qui ont à la fois le pouvoir de circonscrire et d’ouvrir les sens et les imaginaires. Donc pas de plan, pas d’idées préconçues, pas de définition d’objets ou de choix d’un matériau spécifique au préalable mais une fiction pour réunir et unifier le sens de nos actions, au même titre qu’une « boussole dramaturgique ».
3. Dans la peau d’une corneille
Cette partie de la recherche Théâtre & Design a pour but d’explorer la possibilité de créer des écritures théâtrales émergeant de la pratique du design.
Le design est une discipline à part entière dont il est difficile pour ne pas dire impossible d’en donner une définition intrinsèque. Le designer chercheur Emile de Visscher l’explicite clairement : “ The truth is, design is a swarm.” J’appartiens à cette catégorie de designers qui aiment s’aventurer vers de nouveaux territoires; cette approche reflète davantage la complexité et les défis à relever pour notre société. En tant que designer praticienne, le design est pour moi la capacité à matérialiser tout un mode de pensée par le biais de la forme. Il s’agit de l’habileté à formaliser une vision du monde dans la conception d’un objet. Il est donc important, sous cet angle, de savoir quels paradigmes le design souhaite incarner aujourd’hui. La perspective fonctionnaliste du design héritée de l’époque moderne ne semble plus être une fin mais un moyen permettant d’explorer de nouvelles approches davantage en adéquation avec nos problèmes sociétaux.
Ma pratique se nourrit de la pensée du philosophe français Baptiste Morizot qui s’efforce de repenser notre rapport à la nature, afin de survivre à la crise écologique globale. Dans son ouvrage Les Diplomates, cohabiter avec les loups sur une nouvelle carte du vivant paru en 2016, il propose de remettre en cause notre vision anthropocentriste du monde en développant une nouvelle forme de diplomatie avec les autres espèces vivantes. Pour lui, il est essentiel de faire l’effort de se mettre à la place des animaux non-humains pour comprendre leur perspective et communiquer avec eux. Grâce à ce déclic déjà présent chez une minorité de scientifiques et d’éthologues, dont il dresse le portrait, il est possible d’envisager une relation inédite avec les autres vivants non-humains qui nous aiderait à conjurer les problèmes environnementaux dont nous sommes responsables.
J’ai voulu tester si je pouvais appliquer les concepts clefs de Morizot – l’art de la diplomatie et le perspectivisme – dans mon quotidien. Je me suis rendue compte que je cohabitais avec une colonie de corneille qui fréquentaient le parc de la HEAD, mon lieu de travail. En fait, c’était plutôt les corneilles qui cohabitaient avec nous les êtres humains. Comme tout animal sauvage, elles avaient l’art de se rendre invisible, en se fondant dans le paysage mi urbain, mi végétal. Il est certain que je ne les aurais jamais remarquées si je n’avais pas été engagée dans cette recherche.
Tous les matins, avant d’aller travailler, je venais leur apporter de la nourriture pour attirer leur attention. Grâce à la mise en place de ce protocole simple, je me suis lancée dans l’exercice de la diplomatie auprès de ces corvidés. L’expérimentation a duré six mois. J’ai pu observer l’évolution de ma relation avec les corneilles et constater comment elles se sont habituées progressivement à mes approches.
Cette approche perspectiviste multi-spéciste questionne la légitimité de notre rupture avec la nature qui, d’après Philippe Descola, est une séparation superficielle. D’autant plus qu’elle n’a cessé d’exister chez les peuples racines.
Cette capacité à voyager d’une perspective à une autre renvoie à la figure du chamane notamment amérindien qui, pour l’anthropologue Eduardo Viveiros de Castro, est un diplomate par excellence. Les rituels du chamane permettent de préserver l’équilibre entre les êtres humains de sa tribu, les êtres vivants non-humains et le monde des esprits. Grâce aux techniques de transes, dont seul le chamane a le secret, il peut appréhender le monde sous de multiples points de vue pour exercer une influence bienveillante sur toutes les espèces de son environnement. La perspective multi-spéciste est l’apanage du savoir et de la sagesse chamanique. Selon Viveiros de Castro, elle est sous-estimée alors qu’elle devrait bénéficier de la même considération que les sciences occidentales.
Certains peuples racines ont une profonde relation avec les corvidés. C’est le cas du peuple haïda. Les haïdas sont un peuple amérindien vivant sur un archipel de la côte nord-ouest du Pacifique au Canada. Le corbeau est l’animal fondateur du peuple Haïda. Leur mythe cosmogonique raconte qu’à l’origine, le corbeau aurait découvert les premiers hommes enfermés dans une palourde. Les Haïdas se considèrent comme les descendants directs des corbeaux. Le corvidé est omniprésent dans leur culture et ils ont développé un art unique des blasons, des masques et des totems marqué par cette vision du monde qui « rappelle l’appartenance des hommes aux domaines des esprits et leur parenté avec tout ce qui vit ». Pour l’autrice canadienne d’origine amérindienne Eden Robinson, le corbeau dans la culture haïda symbolise « la création, la connaissance, le prestige ainsi que la complexité de la nature et la subtilité de la vérité. Il symbolise également l’inconnu et montre que chaque personne voit le monde d’une manière différente ».
Cette filiation originelle avec le corbeau et ce mode de pensée animiste ont trouvé corps dans leurs arts qui occupent une place prépondérante dans leur organisation sociale, politique et religieuse. D’après Claude Levi-Strauss, les artisans de ce peuple étaient des « designers émérites ». Ils ont notamment développé un style de design caractéristique qu’on nomme « le dédoublement de la représentation ». Il est défini comme un art figuratif représentant majoritairement le monde animalier. Mais cette forme esthétique n’est pas totalement réaliste. Les artistes représentent les animaux comme deux profils d’un corps disloqué joints au niveau de la tête. Le point de vue de face (frontal) dans l’art de la représentation Haïda n’existe pas vraiment. Les statues totémiques doivent être perçues par exemple comme deux moitiés du corps d’un animal vues de profil recollées au visage. Au-delà de sa fonction décorative, il s’agit surtout d’un langage visuel et formel qui illustre leur conception et leur rapport au monde. Ce design systémique dont les origines demeurent obscures est répandu dans le quotidien des Haïdas, rythmé de danses cérémonielles et de rites de passages. Les artisans créent pour ces occasions toute une panoplie d’objets de rituels prisés dont une riche variété de marionnettes et de masques que Lévis-Strauss décrit comme « tout un arsenal de théâtre. » La cérémonie la plus emblématique des Haïdas était le Potlach, un évènement de troc ritualisé qui marquait un moment important dans la vie du clan. Il ne reste aucune trace du déroulement de cette cérémonie. Les haïdas ont perdu l’usage de leurs coutumes avec la colonisation britannique causant le déclin de ce peuple et de sa culture.
Le masque permet de reconvoquer ce temps du mythe caractéristique chez les peuples racines où s’entremêlaient sans exception tous les êtres vivants dans la nature. Comme l’explique Levi-Strauss, le masque est Homme et autre chose que l’Homme; il est le médiateur par excellence entre la société et la nature. Cette définition résonne avec la figure modératrice du diplomate que Baptiste Morizot conceptualise pour envisager un moyen durable de sortir d’une conception mécaniste de l’animal. Ce projet de masque est le résultat d’une pratique débridée et pluraliste du design qui peut orienter le champ du théâtre de multiples manières. Objet à haut potentiel performatif, il invite le théâtre à se le réapproprier pour l’incarner dans une performance délivrant son message transfiguré.
II. Interviews
« Acting Things vient d’une question que je me pose continuellement : qui façonne qui ? »
Judith Seng nous accueille dans son atelier berlinois. Ambiance calme et studieuse. Au plafond de la première salle se trouve un bâton de bois qui tient en équilibre, seulement attaché à son extrémité au plafond. « C’est un objet pour lancer une conversation », explique Judith Seng. Nous souhaitions interviewer cette créatrice allemande afin qu’elle nous parle de sa pratique entre design et performance. Une approche singulière qui nous intéressait pour questionner notre définition de l’objet performatif.
Propos recueillis par Isis Fahmy et Benoît Renaudin
Isis Fahmy et Benoît Renaudin : Expliquez-nous votre usage du terme « acting thing » que vous utilisez dans vos nombreux projets ?
Judith Seng : Je préfère l’utilisation du mot chose plutôt que celle du terme objet que l’on emploie communément en design. Je pense qu’il est plus complexe. Bruno Latour, par exemple, aborde le mot chose comme un terme avec des enchevêtrements très intéressants. À propos de la série de projets que j’ai nommée Acting Things, je dirais que ce sont comme des récipients de matière sociale. Je suis attirée par la notion de design chorégraphique. L’étymologie du mot vient de l’idée de tracer le cercle du chœur. Pour moi, il s’agit de concevoir l’interaction entre les personnes, les corps, les objets et les espaces. Il donne un aspect temporel à la conception, à la compréhension de ces enchevêtrements, à leur traitement.
J’ai cette formation en design de processus. Mon travail a longtemps consisté à concevoir des lieux de travail, il s’agissait toujours de s’occuper de l’organisation et de la gestion des flux d’un lieu et d’une organisation. Je voulais étendre mon champ des possibles. Acting Things vient de cette question que je me pose continuellement : qui façonne qui ? Le moment clé a été lorsque j’ai commencé à m’intéresser à la Bandltanz, une danse traditionnelle allemande. Il m’est soudain apparu évident que la chorégraphie changeait l’objet et vice versa. C’est cette unité entre les matériaux et les gens que je cherche.
De quelle manière mettez-vous en place vos projets ?
Je travaille rarement avec la narration dans le sens où je n’écris pas vraiment d’histoires. J’établis plutôt des règles, des protocoles et je prépare avec précision les matériaux qui seront utilisés pendant le processus.
Pouvez-vous justement nous décrire le processus de création d’Acting things VII ?
J’ai réalisé ce travail en automne 2018 à la Biennale de Design d’Istanbul à l’Ecole de mesure des fluides. C’est un projet toujours en cours. J’étais intéressée par la dynamique du grand bazar d’Istanbul. Il y a un cadre particulier, une relation privilégiée entre le vendeur et l’acheteur. J’ai commencé à me demander si elles étaient différentes à certains moments de la journée. Lors de mes recherches iconographiques, je suis tombée sur une collection de pièces d’argent d’origine ottomane et d’outils de mesure. Je me suis concentrée sur une pièce d’argile ancienne qui ressemble à une assiette. On peut y lire l’histoire d’une dette, gravée. Cet objet pouvait, à cette époque, être échangé contre la dette. J’ai enquêté à partir de là et j’ai trouvé qu’en France, il existait un bureau international des poids et mesures fondé au XIXe siècle dont le but était de créer des normes. Comment pouvons-nous fixer ce qu’est un kilogramme ? Dans quel processus établissons-nous des normes ? À ce stade de mes recherches, j’ai eu l’idée de développer une méthode de mesure des négociations sociales.
Et quelle forme cela prend de mesurer les négociations sociales ?
C’est devenu une installation dans un musée qui a duré six semaines. Elle changeait continuellement et se composait de 18 tas de sable de différentes couleurs. Il y avait des outils que les participants pouvaient utiliser et des tableaux de valeur du sable qui décrivaient le processus au cours des six semaines. J’ai fabriqué des tables d’entraînement au mouvement du sable qui expliquaient comment travailler avec le sable. Et il y avait une documentation de l’activation qui a eu lieu tout le temps de la monstration. Chaque séance de négociation a été répertoriée, imprimée et affichée pendant l’installation.
Quel était le principe pour les participants ?
Il fallait tout d’abord s’inscrire pour une négociation. Les participants pouvaient se connaître ou pas. Une fois dans l’espace, on les accueillait et on leur donnait des vêtements en papier blanc pour qu’ils puissent être différents du public qui pouvait être également dans l’espace. Ensuite, nous expliquions où nous en étions dans le processus des six semaines. Deux valeurs étaient ensuite attribuées. Par exemple : individualité et normalisation. Chaque tas de sable représentait une valeur. Ensuite, nous leur demandions de réfléchir à la pertinence de négocier la relation entre les deux valeurs. Ils pouvaient s’entraîner avant. Quand ils étaient prêts, ils allaient à ces deux grands tas de sable avec pour règle d’avoir un dialogue silencieux. Cela durait ensuite entre 30 minutes et une heure. Ils devaient avoir un dialogue basé sur les gestes et empreintes. Ils faisaient six parties et pouvaient faire une pause pour réfléchir à ce qui s’était passé. Ils étaient filmés d’en haut et il y avait un médiateur qui leur donnait, à la fin de leur session de négociation, un morceau de papier où ils décrivaient ce qui s’était passé. Ce document devenait comme une carte ou un paysage des séances de négociation.
« Je suis un designer industriel amateur : je pars d’un idéal de théâtre pour imaginer des objets. »
Cet entretien permet d’éclairer la pratique d’Halory Goerger d’une manière différente. Et si le metteur en scène français était en fait un designer ?
Propos recueillis par Isis Fahmy et Benoît Renaudin
Isis Fahmy et Benoît Renaudin: Pouvez-vous prendre un exemple d’objet performatif que vous avez mis en scène dans un de vos spectacles et nous raconter son processus de création et de fabrication ?
Halory Goerger: Dans mon spectacle Corps Diplomatique, j’ai imaginé des bannières en LED souples. Cet objet vient d’un cliché de civilisation : les bannières de processions religieuses qu’on trouve dans les pays très catholiques mais également celles de milieux populaires comme dans le Nord de la France d’où je suis originaire. J’ai grandi à Dunkerque. Dans cette ville, se déroule ce festival de pêcheurs chaque année où l’on retrouve cet objet trans-genre. Lorsque j’ai commencé à imaginer ma bannière, mon image de référence était Christophe Colomb qui découvre le continent américain, le conquistador qui plante sa bannière encadré par des soldats. Dans la création Corps Diplomatique, ce sont des astronautes amateurs qui possèdent et manipulent ces bannières. Cet objet représente un besoin que nous avons lorsqu’on découvre un territoire. On doit se l’approprier en plantant une bannière.
Au début de la conception de cet objet, il y a maintenant quelques années, je cherchais sur internet des sites qui proposaient des produits chinois que je trouvais révolutionnaires : les bandes de LED souples. Bon maintenant il y en a partout. J’avais envie de créer un objet qui soit dynamique. Ses étapes de fabrication se sont déroulées dans une forme de sérendipité J’ai commencé par dessiner l’objet tel que je l’imaginais, comme ça, avec une tige télescopique qui tient une bâche et qui puisse être porté par les interprètes. J’ai fait un premier prototype à l’échelle 1 avec un manche à balai. Alors quand c’est un gaillard comme moi qui fait 2 mètres et 87 kilos, ça va. Mais quand une actrice plus fluette s’est emparée de cette première bannière, elle est littéralement tombée sous le poids de l’ensemble. C’est assez incroyable de penser que dans ces premières étapes, je découvrais les contraintes que d’autres avaient déjà découvertes depuis des centaines d’années, en fabriquant le même objet dans le passé.
Expliquez-nous la suite du processus…
On a commandé les LED et on a reçu les rubans. Très vite, avec le designer avec qui je travaillais et qui devait s’occuper de développer le système, nous nous sommes aperçus que la manière dont nous devions souder les LED entre elles allait changer la façon de coder les matrices lumineuses. Nous étions dans les ateliers de Nanterre-Amandiers et avec les techniciens nous fabriquions en même temps l’objet. Nous avons dû faire beaucoup de compromis. Notamment je voulais que des mots s’affichent sur les bannières, mais au-delà de 9 lettres, cela devenait disgracieux. Cette contrainte a notamment formaté le langage que je devais utiliser. Au moment où nous arrivions à faire s’afficher des images sur cette bannière, nous étions quelques jours avant la première de la pièce. Il fallait maintenant écrire pour ces bannières car la production de cet objet était en lien avec ce qui se développe sur le plateau, avec les interprètes. J’ai besoin que ce soit hyper lié car je pense qu’il doit être chargé symboliquement.
Quel type d’objet avez-vous alors fabriqué ?
Il dépasse largement l’objet domestique ou l’accessoire de théâtre. Il n’a pas d’autre existence que celle du plateau. Par exemple, je ne peux pas dire à l’accessoiriste la veille d’un spectacle : « Est-ce que tu pourrais me trouver une bannière lumineuse que nous pourrions programmer ? ». C’est un objet qui dépasse ceux du quotidien, un instrument dont l’interprète s’empare sur le plateau.
En quoi cette bannière n’est pas un accessoire de théâtre ?
Ses propriétés sont générées par le dispositif. Il n’y a pas d’expérience de cet objet en dehors du spectacle. Il y a une double interaction entre sa fabrication et mon écriture théâtrale. C’est d’ailleurs moi qui ai créé les contraintes pour qu’il fonctionne sur scène.
Comment, en termes d’interactions, cet objet fonctionne ?
Au début du Corps Diplomatique, ces bannières étaient des systèmes de communication. Le spectacle raconte une évolution de 8000 ans et ces bannières changent de fonction au fur et à mesure du spectacle et de l’évolution de l’histoire. Elles deviennent alors des outils d’éducation. Mon personnage s’en sert pour laver le cerveau de ses élèves et faire apprendre le Lincos, une sorte de latin local. Au bout d’un certain moment, elles redeviennent des objets de processions religieuses, ce qui aurait horrifié les premiers habitants du Corps Diplomatique.
Ces bannières, sur le plateau de théâtre, sont centrales et produisent même une grande partie de la lumière. Il existe également une interaction entre l’objet et les interprètes. Par exemple, il y a cette scène où l’acteur Arnaud Boulogne a pour instruction de caresser la bannière alors que je joue de mon côté sur un iPad qui envoie un signal sonore à la bannière et transforme son intensité lumineuse. Le spectateur se concentre sur ce que fait Arnaud. Je respecte et transgresse certaines règles quant à l’interaction entre l’objet et l’interprète. Un autre exemple, à un moment du Corps Diplomatique, les interprètes sont assis au sol et appuient sur une télécommande qui fait défiler les images. Nous en avions une qui fonctionnait avec un microprocesseur Arduino, mais elle était instable. Nous nous en sommes servis pendant les répétitions pour des raisons pratiques, mais lors de la représentation, c’est la régie qui s’en est occupé et les comédiens tenaient seulement la télécommande. Pour moi il existe quand même une interaction aux yeux du spectateur.
En quoi la fonction de l’objet performatif est différente de celle d’un objet du quotidien ?
Je vais prendre maintenant l’exemple de mon nouveau spectacle qui vient juste d’être créé, Four for. Je propose une expérience dans l’espace mental du compositeur américain Morton Feldman le jour de son décès. Sur scène, il y a un piano préparé, des cristaux qui sont du même aspect laqué noir, un trou noir, de la laine qui recouvre le plateau, une boîte noire un peu à la Robert Morris où pourrait reposer le corps de Morton Feldman et qui, posé sur un plateau, rappelle un lit médicalisé. Il y a également une télé des années 1980 et un écran plus récent sur lequel apparaissent un encéphalogramme et un IRM. Ces données, ce sont du code, en fait, qui est géré en régie. Les spectateurs attentifs se rendent compte pendant le spectacle que le compteur change et passe de 30 bpm à 60 bpm, à 90 bpm. Cette évolution est en relation avec les actions que nous jouons sur scène qui sont retranscrites en courbes sonores. Autour de la boîte noire, nous avons placé des capteurs infrarouges qui permettent aux interprètes de changer les graves et le volume d’un son. C’est le fonctionnement, en gros d’un thérémine, mais ce qui était intéressant c’est que ce système permettait de faire de grands gestes.
Comment avez-vous développé le maniement de ce dispositif ?
Pour travailler la manière de bouger ses mains, nous avons fait un stage avec une personne qui pratique le Reiki, une technique de guérison par imposition des mains. Même si ça ne fait pas partie de mes références culturelles, j’ai voulu parler de ces techniques avec bienveillance. On parle de magnétisme, de rebouteux. Dans le spectacle, je me suis inspiré des gestes du Reiki, mais ils sont beaucoup plus saccadés, beaucoup plus amples pour des raisons techniques.
Je pourrais dire, si je reprends votre terme, que c’est un objet performatif éclaté qui n’a pas de physicalité. Il renforce le discours, il sert à créer des situations de jeu. Il se place au service d’une narration. Quand les interprètes jouent, ce n’est pas de l’improvisation, nous adaptons une pièce de John Cage, Imaginary Landscapte n°1. Il l’avait, au début, composée pour platine vinyle où le musicien changeait la vitesse afin de changer la fréquence de ce qui était joué.
Une de mes difficultés, c’est que les interprètes doivent s’emparer des objets que j’imagine. Je suis un designer industriel amateur : je pars d’un idéal de théâtre pour imaginer des objets.
III. Conclusion: de nouvelles pistes d’écritures en théâtre et en design
Comment un nouvel objet de design peut-il générer des comportements inédits, ouvrant un champ d’expérimentation pour l’acteur ou le spectateur ? Comment le design enrichit-il le champ théâtral en approfondissement l’objet comme vecteur de signes et de sens ? La naissance d’un objet peut-elle être traitée de la même manière que des répétitions ou des improvisations de théâtre ? Il reste finalement beaucoup de questionnements et de pistes réflexives à la fin de notre recherche. Cette expérience a mis en lumière un élément qui est souvent occulté dans la vision finale de l’objet ou de la performance théâtrale, c’est la joie créative que procure l’interaction entre la matière et la pensée, entre le pouvoir de la narration et l’acte de création.
La force de l’objet performatif est, nous semble-t-il, dans sa capacité à faire dialoguer le fond et la forme, l’idée et le faire. Comment réussir à reproduire ces situations artistiques que nous avons expérimentées lors de la recherche ? Nous repartons avec ce processus observé à plusieurs endroits de la recherche : l’objet génère l’idée et inversement l’idée modèle constamment l’objet.
IV. Bibliographie
Livres
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Lamm Olivier, “Dumb Type, conversation secrètes”, Libération, Vendredi 9 février 2018, p.28-29
Mary Catherine, Baptiste Morizot “ L’humain peut jouer un rôle de diplomate auprès des autres êtres vivants”, Le Monde, samedi 15 décembre 2018, p.6
Siclier Sylvain, “La troublante et émouvante fantasmagorie de Nosfell”, Le Monde, samedi 15 octobre 2019, p.24
Spectacles
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